De la matière
L’illusion du réel.
Pourrait-on naître sans particules élémentaires du néant ? Cette question, certains se la posent tous les jours, ils doutent plus souvent qu’à leur tour, mais parfois touchent le firmament de la réussite, le graal, l’eurêka de la blouse blanche : Une découverte ! Une vraie. Près de soixante quinze années de recherche, des millions d’euros engloutis, enfin, on a trouvé. Trouvé quoi ? La chaussette manquante, pardi ! Celle qui vous fuit quand le linge se fait sale. Un formidable outil : Le savoir universel.
« Matière, une magnifique illusion », Guido Tonelli, paru chez Dunod en 2023.
Illustration de couverture du livre de Guido Tonelli,« Matière, une magnifique illusion ».
Tout d'abord, il faut saluer l'ambition de Guido Tonelli. L'auteur, chercheur invité au CERN et professeur à l’université de Pise, nous emmène dans un voyage cosmique où les particules subatomiques dansent la valse pour former la matière ordinaire.
Imaginez un peu : des électrons, des neutrons et des protons qui se rencontrent dans une soirée quantique et décident de former un atome. C'est un peu plus romantique qu’un accélérateur de particules, mais avec les mêmes personnages, tous beaucoup plus petits et moins bavards.
Le livre nous promet de découvrir comment ces minuscules danseurs se combinent pour donner naissance à des propriétés fantastiques. Du vide quantique aux trous noirs, Tonelli nous guide à travers les formes obscures de la matière. C'est un peu comme si on visitait un musée de la physique où chaque salle est plus mystérieuse que la précédente.
Vous pensiez que le vide était vide ? Détrompez-vous, il est plein, mais de surprises. C'est un peu comme ces placards où on range tout ce qu'on ne veut pas voir, mais en version cosmique. Un univers où l’on se sent l’aventurier à la recherche de la chaussette perdue évoquée précédemment.
Mais attention, ce n'est pas un livre pour les âmes sensibles. Si vous n'êtes pas familier avec les termes comme « boson de Higgs » ou « matière noire », accrochez-vous. Tonelli nous plonge dans un univers où les lois de la physique sont les règles du jeu. Je ne suis pas physicien et vous non plus à priori. Alors, on peut passer à côté de cette sublime couverture, dont la forme ne saurait éclipser un fond bien plus cultivé qu'un terrain vague.
Heureusement, l’auteur sait rendre ces concepts accessibles, même pour ceux qui pensaient que la physique était réservée aux génies en blouse blanche. Sont-ils d’ailleurs réellement des génies ? Celui là, en a apparemment l’étoffe. Ce qui, pour un simple tailleur de famille relève de la confection femtométrique est ici un comble d’intérêt.
« Il n'y aurait pas de Terre, pas d'eau, pas d'air, pas de formes vivantes, si la matière n'avait pas ces propriétés fantastiques que les physiciens tentent d'élucider. » – Guido Tonelli, dans « Matière, une magnifique illusion ».
Et puis, il y a cette poésie dans l'écriture de Tonelli. Il parvient à rendre la science lyrique, presque magique. On se surprend à rêver de quarks et de leptons comme on rêverait de licornes et de dragons. Enfin presque. On rêve parfois d’autre chose et ça n’en est pas moins excitant, petit(e) pervers(e). Par contre, nous en conviendrons je le crois aisément, il est un exploit de transformer des équations en poèmes, et Tonelli y parvient avec brio.
En somme, « Matière » est une magnifique illusion, un tour de passe-passe scientifique où l'auteur nous fait croire que comprendre l'univers est à la portée de tous. Et même si on ne comprend pas tout, que cela donne le tournis, pour certains la nausée, on ressort de cette lecture avec des étoiles plein les yeux et des particules plein la tête, comme autant de bulles de savoir qui ne demandent qu’à éclater.
« La vie a besoin d'illusions, c'est-à-dire de non-vérités tenues pour des vérités. » – Friedrich Nietzsche.
En effet, les illusions sont essentielles à notre existence, car elles nous permettent de donner un sens à notre vie et de supporter les réalités parfois dures de notre condition humaine. Dans le contexte de l'ouvrage de Tonelli, cette réflexion prend une dimension particulière. Tonelli explore comment notre perception de la matière, que nous considérons souvent comme solide et tangible, est en réalité une construction complexe de particules subatomiques et d'interactions éphémères. La matière, telle que nous la percevons, est une illusion créée par notre esprit pour donner un sens à un univers fondamentalement insaisissable.
Nietzsche suggère que ces illusions sont nécessaires pour notre bien-être psychologique et notre survie. Sans elles, nous serions confrontés à l'absurdité et à l'incertitude de l'existence. De même, Tonelli montre que notre compréhension scientifique de la matière, bien que fondée sur des observations rigoureuses, repose également sur des modèles et des théories qui sont, en quelque sorte, des illusions nécessaires pour appréhender l'infiniment petit et l'infiniment grand.
Le thème central de l'ouvrage de Tonelli est bien la nature illusoire de notre réalité matérielle. L’auteur nous invite à réfléchir sur la manière dont nos perceptions et nos croyances façonnent notre expérience du monde, et à accepter que même les vérités scientifiques les plus solides peuvent contenir une part d'illusion. Cette acceptation nous rend assurément plus humbles face à l'immensité de l'univers et à la complexité de notre propre existence.
E finito ! Roulement de tambour, tagada tsoin tsoin.
La confection femtométrique.
Animation de l'illustration de la couverture du livre de Guido Tonelli, « Matière, une magnifique illusion » avec Processing.
Seulement voilà, il y a autre chose. Encore une intuition idiote ? Oui, peut-être. C'est pas de ma faute, c'est pas moi, c'est vous. Dès la fin de la lecture de cet ouvrage, m’est apparue cette question de nature fondamentale : Comment faire accepter ces « bulles de savoir » à la bête de somme qui rentre d’une journée harassante de stakhanoviste du marteau sans qu’il vous prenne pour son outil ? Donnez lui un jour de repos supplémentaire et il vous lira tout ce que vous voulez…Pas sûr…L’âme humaine est aussi dure à sonder que le plus petit des atomes d’hydrogène et parfois, le physique commande à la physique tout court.
- « Ta gueule Pitié, baisse d'un ton ! Laisse moi dormir…putain s'il te plaît ! Ils M’EMMERDENT peuvent attendre un peu les génies !!! »
Convaincre un ouvrier des bénéfices de la recherche fondamentale sur le boson de Higgs peut sembler un défi, surtout si on est en train de discuter autour d'une bière après le boulot. Il va falloir être à la fois simple, direct et utiliser des analogies qui parlent à son expérience quotidienne.
1. Commencer par une analogie simple :
- « Tu sais, c’est un peu comme si on essayait de comprendre comment marche une bagnole en étudiant toutes les petites pièces qui la composent. Le boson de Higgs, c’est un peu comme cette clé de moteur qui permet à toutes les pièces de fonctionner ensemble. Sans elle, rien ne marcherait comme il faut. Tu te rappelles quand tu l’as perdue ? T’as cassé tous les meubles pour la retrouver et elle était dans ta poche…Ah le con petit gremlins ! »
Cela permet de démystifier la recherche sur le boson de Higgs, en la comparant à quelque chose de plus concret et compréhensible et surtout pas de nous prendre pour des cons d'être abscons.
2. Mettre en avant des retombées concrètes et immédiates :
- « Bon, je sais, ça peut sembler un peu loin de la réalité. Mais tu vois, la recherche sur des trucs comme le boson de Higgs a conduit à des découvertes qui ont changé des industries entières. Par exemple, sans ce genre de recherches, on n’aurait probablement pas internet tel qu’on le connaît aujourd’hui… »
- « Interkoâ ? »
- « …ou des trucs qu’on utilise tous les jours, comme des scanners médicaux ou des technologies d'imagerie qui sauvent des vies. »
3. Mettre l’accent sur l’effet domino :
- « Tu vois, la recherche sur des trucs comme le boson de Higgs peut sembler très théorique, mais souvent, c’est en cherchant des choses qu’on ne comprend pas bien au départ qu’on finit par inventer des trucs qui nous rendent la vie plus facile. Genre, les chercheurs qui ont découvert les rayons X en cherchant comment comprendre la matière ont fini par permettre la radiographie dans les hôpitaux ! Tu sais, quand tu t’es cassé la gueule de ton escabeau la dernière fois, ça a aidé pour trouver la fracture. »
- « […] »
- « Non, pas la fracture sociale, celle que tu avais en te relevant, la jambe à l’envers dans l’dos ! »
- « Oh putain d'merde mon dieu ! M'en parle pas, j'emmerde ces enculés de fils de pute, salauds ! Allez crever, raclures de bidet ! Mangez vos morts ! je ne puis me contenir… »
4. Appeler à la fierté collective :
- « La recherche fondamentale, c’est aussi une question de fierté. Comme toi, quand tu vas au match et que tu les traites d’enculés de gens de peu de foi, ceux d’en face ! L’humanité s’attaque aux questions les plus profondes de l’univers, comme toi à la dernière gorgée de cette pinte. »
- « Une autre ? […] UNE AUTRE ! »
- « Et même si ça ne te rapporte pas de l'argent directement, ça fait partie de l'évolution de notre société. Un peu comme la construction d’un pont — au début, ça n’a l'air de rien, mais à la fin, ça te permet de traverser un ruisseau ou une rivière bien plus facilement […]. »
- « Oui, exactement comme avec le Yang-Tsé-Kiang ! Le fleuve jaune…c’est ça. »
5. Utiliser l'exemple du travail quotidien :
- « Tu sais, quand on bosse sur un chantier, parfois on n'a pas l'impression que ça va changer grand-chose, mais chaque petit progrès, chaque clou qui ne te perce pas la main, chaque vis qui ne traverse pas ton pied, finit par faire une grosse différence. La recherche sur le boson de Higgs, c’est pareil : ça semble un peu loin de notre quotidien, mais ça pousse l'humanité à avancer. »
- « On va être les meilleurs, les plus forts, et c’est sûr le chef il va fermer sa gueule être impressionné ! »
- « Et un jour, ce qu’on a découvert aujourd’hui pourrait bien nous être utile, peut-être même dans des choses que tu ne vois pas venir. »
- « Comme les impôts chaque année ? »
- « Oui c’est ça, un peu comme les impôts chaque année, mais en plus dingue ! Comme une girafe remplie de schnaps ! »
Conclusion :
- « Tu as compris que la recherche fondamentale est le fondement de l’innovation hein ? Non ? Même si ses bénéfices ne sont pas toujours immédiats, on gagne sa peine à la sueur de son front aussi là ! »
- « Grosso merdo modo, oui. »
- « Nul besoin d’entrer dans des détails techniques complexes ! Surtout à cette heure tardive. Il suffit de montrer que tout ce qu’on utilise au quotidien, le marteau, la meuleuse ou le papier cul toilette, ont une origine, souvent surprenante, dans des recherches comme celle sur le boson. La curiosité scientifique est ce qui a permis à l’humanité de progresser, et même si ça ne change pas la bière de ce soir…On va vivre dans un monde plus connecté, plus sain et plus innovant ! »
- « J’te laisse faut que j’aille gerber remettre en terre les particules de substance magique qu'elle m'a prêté… »
- « ??Allez, boson bien comme il faut et tout ira bien ! Ciao la compagnie ! »
Attention à ne pas fixer trop longtemps cette animation de l'illustration de la couverture du livre de Guido Tonelli, il y a matière à rendre malade et faire vomir.
En résumé, la découverte du boson de Higgs et la recherche fondamentale en général ça fout la gerbe ont des retombées potentielles qui vont bien au-delà de la simple satisfaction intellectuelle. Elles peuvent conduire à des innovations technologiques, à la création d'emplois, à l'amélioration des compétences et à une meilleure qualité de vie pour tous, sauf pour celui qui nettoie derrière.
Nota bene : Comme d'habitude, je décline toute responsabilité pour les propos alambiqués proférés par nos scientifiques de fin de soirée. Je ne suis pas physicien mais il m'arrive aussi de boire des bières. Même si l'âge aidant, le sang de la terre et les particules de raisin me semblent parfois plus attirantes. Comprenons les bien. Passons pudiquement un voile sur les faits et gestes de nos protagonistes et concentrons nous sur l'essentiel. Boson bien et tout ira bien.
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